Chaque semaine sur Paris New York TV, la libraire Anne Brouilhet vous propose de découvrir un roman dont l’action se passe à New York. Cette fois-ci, une nouveauté envoûtante, parue aux éditions Stock et découverte dans la librairie de son quartier. Ce premier roman, une petite pépite parue en 2015 aux USA, vient d’être traduit en Français ! Il est l’œuvre d’une jeune femme new-yorkaise, née à Manhattan, diplômée de la New York University. Elle collabore au New Yorker. Elle a été reconnue, saluée immédiatement par la critique et des auteurs renommés comme Jonathan Safran Foer comme faisant partie de la nouvelle génération montante et talentueuse de la littérature américaine et plus spécifiquement new-yorkaise. Et on est bien d’accord…
Que raconte le roman « Parmi les dix milliers de choses » ?
Une famille new-yorkaise prise en délit de désintégration s’expose à l’introspection active de chacun de ses membres de manière plus ou moins consciente. Le lecteur s’immisce dans l’intimité des pensées de Jack, Deb, Simon et Kate grâce à la complicité subtile de la narratrice-auteur qui distille au gré des circonstances des indices, des empreintes, des traces de leur existence dans une dynamique temporelle perturbée, une chronologie mouvementée.
« Parmi les dix milliers de choses » est l’histoire d’un avant, d’un après et surtout d’un entre-deux qui dure. Son espace-temps en expansion enfle jusqu’à l’éclatement. Sa fin n’est pas une surprise lorsqu’il propulse les protagonistes hors du champs d’attraction de la Grosse Pomme. Quand ils y reviennent, Simon et Kate, devenue Catherine, réinventent le lien originel, le ravissement d’une fraternité complice pour se mettre en orbite, sur le chemin de la reconstruction.
L’avant ?
L’art et la danse « avaient poussé » Jack et Deb vers New York, à Manhattan. « La ville dégageait une telle énergie nocturne que même la lumière ne pouvait l’atténuer ». Là, tout commençait pour ensuite se diffuser dans le pays. C’est là qu’il fallait être ! C’est là, qu’ils s’étaient rencontrés, c’est là qu’étaient nés leurs enfants. C’est là qu’ils étaient. Lui, pour créer et exposer ses installations, elle, donner des cours de danse et élever Simon et Kate. Une source d’inspiration et de bien-être. Deb « n’avait jamais posé de regard blasé sur New York ». Leurs enfants de quinze et onze ans, de vrais petits citadins qui grâce à leur sensibilité et leur intelligence se sont construits leur propre univers au creux de la métropole. Comment les faire s’exprimer pour les protéger sans les agresser ? La temporalité dilatée par les souvenirs s’incruste dans le présent bouleversé par le surgissement anecdotique d’une boîte en carton puis par l’indiscrétion de Kate, persuadée qu’il s’agit d’un cadeau qui lui est adressé. Et là tout bascule… « La vie aurait pu prendre un autre tour, une des mille manières possibles de tout faire voler en éclats… ».
L’après ?
Le temps de la vie qui continue, s’accélère brutalement. La roue tourne. C’est le temps court des révélations et des aboutissements. Quand le lecteur se met à penser que tout a été écrit, le récit semble mourir aussi naturellement qu’il avait commencé.
L’entre-deux ?
C’est le temps long des vacances, de l’éloignement en quête de sens. Le temps des explications, des origines, des pourquoi, des parce que. Le temps des enfants devenus des adolescents. Le temps essentiel qui s’attarde pour dévoiler, révéler…qu’il faut s’accorder pour ne pas se fourvoyer.
Et encore après….. Le temps ouvert de l’oubli et des retrouvailles pour un futur de tous les possibles.
Pourquoi nous vous recommandons ce livre ?
Un schéma narratif inventif
Pour son originalité exemplaire et authentique. Tout d’abord, au travers de son schéma narratif, parfois difficile à suivre, mais délibérément inventif. Il épouse au plus près la sensibilité des personnages, les trajets des évènements, des accidents de parcours, des tours et des détours de la trahison de Jack pour en révéler les soubassements et les conséquences avec finesse et délicatesse.
Des fulgurances dans l’écriture
Puis, dans l’expression, le ton, les fulgurances du style très métaphorique qui par petites touches bousculent, questionnent la solitude des protagonistes. Il leur offre la liberté de l’impulsion, la liberté de s’exprimer directement au lecteur sans entrave, entre les lignes, hors du cadre tracé pour les descriptions, les dialogues. Il leur permet d’interrompre le fil narratif pour s’expliquer, ajouter une nuance, modifier ainsi la luminosité ambiante. Ainsi se crée, le plus naturellement possible, l’œuvre littéraire, sous forme d’une métamorphose esthétique d’une histoire unique et sans pareille mais d’une histoire qui ressemble à tant d’autres (sans être tout à fait la même).
Une plongée dans la complexité humaine et un cadre new-yorkais
Ensuite, parce que il se dégage de ces pages quelque chose de puissant, d’attachant, de captivant qu’il est très difficile de saisir. Une chaleur robuste qui résiste à la simplification, à la justification, à la condamnation, qui tente d’explorer la complexité humaine des personnages en prenant le risque de perdre la confiance du lecteur. Enfin New York, New York ! La ville lumière accueille, recueille ce morceau de vie, lui donne sa tonalité particulière, sa crédibilité. C’est des rues de la grande cité que part le fil tenace et invisible qui fait tenir ensemble les belles phrases composantes essentielles de cet envoûtant et surprenant roman. Sans New York, ce livre n’aurait pas été possible !
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